|
Comme il n’y avait rien cette semaine qui ait attiré mon attention ou plutôt qui aurait pu être commenté brièvement, je vous propose « un peu de littérature », plus précisément de deviner quel est l’auteur de cet extrait (une chance sur 4 de gagner).
« Le paysage de forêts et de prairies, absolument désert, lui parut baigné d'un silence religieux. Certainement, si Dieu était présent dans sa création, s'il avait un message à communiquer aux hommes, c'était ici, plutôt que dans les espaces légumes du parc de Bercy, qu'il choisirait de le faire. Il sortit de la voiture. « Quel est le message ? » se demandait-il, et il se sentit à deux doigts de crier la question, s'en abstint de justesse, de toute façon Dieu se tairait, c'était son mode de communication habituel mais c'était sans doute beaucoup, déjà, ce paysage désert et splendide, baigné dans un silence total ; ça tranchait avec la vie de Paris, avec le jeu politique qu'il allait retrouver dans quelques jours. Le message était dans un sens limpide, mais on avait du mal à faire la relation avec l'existence terrestre de Jésus-Christ, marquée par de nombreux rapports humains, de nombreux drames aussi, les aveugles qui voient, les paralytiques qui marchent à nouveau, il s'intéressait même parfois aux miséreux, c'était presque politique par endroits. Ce paisible paysage du Haut-Beaujolais n'évoquait pas davantage les divinités mâle et femelle apparemment célébrées par Prudence, on n’y distinguait rien de mâle ni de femelle, mais quelque chose de plus général, de plus cosmique. Cela ressemblait encore moins au Dieu de l'Ancien testament, querelleur et vindicatif, toujours en bisbille avec son peuple élu. C'était plutôt comme une divinité unique, végétale, la vraie divinité de la terre, avant que les animaux n'apparaissent et ne se mettent à courir dans tous les sens. La divinité était maintenant au repos, dans le calme de cette belle journée d'hiver, il n’y avait pas un souffle de vent ; mais dans quelques semaines l'herbe et les feuilles revivraient, se nourriraient d'eau et de soleil, seraient agitées par la brise. Il y avait quand même, enfin il croyait s'en souvenir, une sorte de reproduction des plantes, avec des fleurs mâles et femelles, le vent et les insectes jouaient un rôle dans l'affaire, d'un autre côté les plantes se reproduisaient parfois par simple division, ou en projetant dans le sol de nouvelles racines, à vrai dire ses souvenirs de biologie végétale étaient lointains, mais cela mobilisait quoi qu'il en soit une dramaturgie moins tendue que les combats de cerfs ou les concours de tee-shirts mouillés. »
| |
|